Pascal Sire, Vice-Président de TRIZ-France, a posté cette vidéo sur le forum Viadéo de l'association.
Tout d'abord, lorsque j'ai regardé cette vidéo, la première chose que je me suis dite est "mais pourquoi je n'y ai pas pensé moi-même ?". C'est systématique chez moi. Lorsque je trouve quelque chose de réellement innovant à mes yeux, je me pose cette question.
Ceci ne minimise en aucun cas le travail de l'inventeur, mais souligne qu'un saut a été fait.
La bonne question à se poser, une fois que cette réaction face à l'innovation a eu lieu, est de se demander : "Pourquoi ?". Pourquoi cet objet m'a-t-il étonné ?
Et là, il faut utiliser les concepts de TRIZ:
En tout premier lieu, l'idéalité. L'idéalité est vraiment une valeur forte dans TRIZ, pour ne pas dire LA valeur forte.
Dans ce cas précis, Si l'on formule la fonction principale de la cuillère, celle-ci est de mélanger le liquide contenu dans la tasse. Idéalement, la Fonction Principale utile de la cuillère doit être satisfaite sans la cuillère.
En second lieu les ressources. Les ressources sont un levier d'innovation souvent négligé. Pour continuer sur notre lancée, et une fois vouloir viser l'idéalité, on peut s'intéresser aux ressources disponibles dans l'environnement du problème pour résoudre celui-ci. La tasse en est une. Ainsi, si l'on peut utiliser la tasse pour satisfaire la fonction de la cuillère, on a gagné.
Et c'est ce qu'a réalisé l'inventeur de cette tasse.
Il y a bien sur d'autres principes de la matrice utilisés, comme par exemple :
- Qualité locale : Des parties différentes d'un objet remplissent des fonctions différentes: les "lames " sont créées pour remplir la fonction de brassage. Idem pour le pivot qui permet de faire tourner la tasse.
- Action à l'inverse : rendre immobile une partie mobile de l'objet et rentre mobile une partie immobile (la tasse par elle même)
- Universalité : L'objet (le mug) réalise plusieurs fonctions différentes, donc les autres objets deviennent inutiles
Comme toujours, essayer de comprendre sur quoi s’appuient les innovations est toujours d'un enseignement intéressant.
Cet objet, si on le compare avec le couple classique "tasse + cuillère", est bien différent. En ce sens, il initie une nouvelle courbe en S, et vient avec son lot de nouveaux problèmes, et nouvelles pistes d'évolution. de nouvelles combinaisons, fonctionnalités ne manqueront pas d’apparaître et feront évoluer cet objet et ses descendants en s'appuyant sur les lois d'évolution.
On a d'ailleurs une tendance naturelle à refouler cette solution qui ne rentre pas dans un schéma connu. Il est possible alors de trouver suffisamment de défauts à ce nouvel objet pour considérer la solution comme faible. Il faut alors se remémorer quelques concepts:
- Tout d'abord, notre jugement est souvent partial par rapport aux nouveautés. Pour l'inventeur, le chemin est déjà fait, mais pour celui qui découvre l'invention ou la nouveauté, le chemin intellectuel est à faire depuis le début. Et cela doit prendre un peu de temps.
- En second lieu, les courbes en S ont toujours des parties de recouvrement, d'une génération à l'autre. Ceci signifie que la nouvelle génération est toujours en retrait sur le plan technique par rapport à la solution mature (Voir pour cela la cohabitation de solutions).
- Et puis, si on examine les lois d'évolution, chaque génération d'objet a tendance à se spécialiser au profit d'une meilleure adaptation à un cas bien particulier. Dans notre cas, cette solution ne remplacera pas la solution classique, mais trouvera une niche. C'est d'ailleurs réalisé car le produit est commercialisé.
Excellent Yves !
RépondreSupprimerJe souscris tout à fait à ton explication très pédagogique et convaincante ;-)
Pascal Sire
VP TRIZ France